
Pendant que Cinna et Marius gèrent les affaires internes à Rome, Sylla est chargé de lutter contre Mithridate.
La lutte contre Mithidrate
Mithridate avait commencé à envahir l’Orient Romain et venait d’arriver en Grèce. Tous les habitants proches des Romains devaient être massacrés et en un seul jour, il y eut plus de 80 000 victimes. Athènes, par exemple, avait pris la cause de Mithridate au sérieux et s’était ralliée à lui, ce qui donnait un nouvel accès à la Méditerranée. A Rhodes, il eut cependant une résistance sérieuses et à Délos, plusieurs milliers de Romains s’étaient réfugiés. La seule vraie résistance venait de Macédoine. Au final, l’armée de Sylla parvint à assiéger Athènes et à la prendre :
Sylla rappela ses hommes, « faisant grâce au petit nombre en l’honneur du grand, aux vivants en l’honneur des morts. » Il avait lui-même récupéré la fameuse bibliothèque d’Aristote, augmentée des ouvrages de ses héritiers, et fit transporter le tout à Rome où un grammairien asiatique, ami de Cicéron et grand connaisseur du maître, put donner de bonnes éditions de son oeuvre » (Hinard, 2000, p. 651).
Il prit ensuite le Pirée et gagna une nouvelle armée, portée à 40 000 personnes. Sylla voulait en découdre avec son ennemi dans la région de Chéronée. Au final, grâce à une stratégie militaire sur laquelle nous n’allons pas nous attarder, Chéronée est reprise à Mithridate et c’est une nouvelle armée qui rejoint Sylla. Il s’apprête alors à passer en Asie mais face à une nouvelle armée, il dût reculer provisoirement avant, de nouveau, de capturer ou de tuer les soldats ennemis. Face à cette deuxième défaite, Mithridate est conduit à une négociation qui aboutit sur la paix de Dardanos (signée en 85. Sylla peut donc retourner à Rome qualifié à deux reprises d’Imperator. De retour en Italie en 83, il constate les dégâts réalisés par Cinna et Marius. Il doit donc affronter les troupes de Norbanus, le consul cette année. Ils tentent de négocier avec Scipio, le second consul, mais n’y parviennent pas. Au printemps, les hostilités reprennent et au final, Sylla réussit à regagner Rome « où il avait fait convoquer une séance du Sénat, au temple de Bellone, en dehors du pomerium – donc comme il était naturel pour un magistrat revêtu d’un imprium militaire – (Hinard, 2000, p. 661).
Le retour de Sylla en Italie et la purge contre les proches de Marius
Lors de son retour à Rome, Sylla est convoqué au Sénat pour rendre compte de son expédition en Orient contre Mithridate. Il a le soutien de sénateurs et de chevaliers qui étaient hostiles à Cinna et à Marius. Disposant toujours de l’imperium militaire, Sylla demande à ce que les différents coupables soient punis. Les sénateurs sont plutôt réticents et Sylla établit une liste de coupables reposant sur l’ensemble de ceux qui avaient été proches de Marius et Cinna. Sur cette liste, on retrouve par exemple Marius le Jeune, consul en 82, ou Marcus Inius Brutus, le père de l’assassin de César. Au total, l’épuration concerne 520 personnes parmi les plus importantes de Rome. Salluste, dans ses Lettres à César, écrit :
Lucius Sylla, à qui, selon le droit de guerre, sa victoire donnait toute licence, tout en comprenant que la mort de ses ennemis pouvait fortifier son parti, n’en fit pourtant périr qu’un petit nombre, et il aima mieux retenir le reste par les bienfaits que par la terreur (cité par Hinard, 2000, p. 666)
Certains sont exécutés dans des conditions légales, d’autres sont mutilés et la foule se révolte contre ceux qui avaient été aux côtés du régime auquel Sylla voulait mettre un terme. Dans la Pharsale, le poète Lucain écrit :
Rappellerai-je les mânes de Catulus apaisés par le sang, lorsque fut offert Marius, triste victime, en expiation à une ombre qui peut-être n’eût pas voulu cette satisfaction abominable à son tombeau invengé ? Nous vîmes ses organes lacérés, des blessures dont le nombre égalait ses membres, dans ce corps frappé tout entier, tout coup mortel évité à l’âme et ce raffinement sinistre d’une cruauté sans nom qui épargne la vie d’un homme qu’on fait périr. Les mains arrachées tombèrent, la langue coupée palpite et frappe l’air vide d’un mouvement silencieux. L’un coupe les oreilles, l’autre les ailes du nez recourbé, celui-ci arrache les globes du creux de leurs orbites et jette les yeux les derniers lorsqu’on a montré les membres. A peine pourra-t-on croire à un crime si sauvage, qu’une seule tête ait pu réunir tant de châtiments. (La Pharsale, II, 173-187, cité par Hénard, 2000, p. 667).
Le cas de la mort de Gratidianus, neveu par adoption de Marius et cousin de Cicéron, est encore plus éloquent puisque sa torture a été faite de manière à ce qu’il reste le plus longtemps en vie (pour en savoir plus, voir Hénard, 2000, p. 667). Dans tous les cas, il s’agit de restaurer la République : les deux consuls, dont Marius le Jeune, sont « proscrits » et ce dernier, cousin de Jules César, se suicide en 82.
La dictature de Sylla
Avec les troubles politiques des dix dernières années, Sylla suggère la mise en place d’un dictateur avec des pouvoirs étendus. Le Sénat les lui accorde, l’objectif étant de rompre avec la période des Gracques : plus aucun homme providentiel ne pourrait se présenter plusieurs années de suite comme l’avait fait Marius. Dictateur durant six mois, comme le prévoit la loi, entre le 1er décembre et le 1er juin 81, il réalise de nombreuses réformes visant à restaurer les pouvoirs de l’oligarchie sénatoriale : le Sénat est augmenter de 300 personnes pour arriver à un total de 600 personnes. L’augmentation du nombre de sénateurs, choisis parmi la clientèle de Sylla, vise à affaiblir le pouvoir de la plèbe. Parmi les différentes mesures, un consul devait attendre 10 ans avant de pouvoir renouveler sa candidature. Depuis la deuxième guerre punique, personne n’avait reçu de dictature : avec Sylla, toutes les institutions tournent autour de sa personne. Il possède sa propre garde, fait frapper la monnaie d’or à son effigie, organise des jeux et, en 79, il retourne à Cumes après avoir déposé sa dictature et meurt en 78.
Source :
Hinard F. « Les années noires » in Hinard F. (dir.) Histoire Romaine tome 1, Paris, Fayard, pp. 611-661



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