Pourquoi les mariages incestueux sont-ils interdits ? La réponse d’Adam Smith

Les mariages peuvent prendre différentes formes : homogamie, polygamie, dans lequel chacun dispose plus ou moins de droits et devoirs. Dans les Leçons sur la jurisprudence (1763-1764), Adam Smith s’intéresse à l’inceste : dans ce cas, il s’agit de mariage entre personnes qui sont liées par un degré d’affinité au sein de la famille.

Le mariage incestueux entre ascendants

Le mariage incestueux est ainsi défini par l’auteur de la Richesse des Nations :

« Je ferai seulement observer sur ce chapitre du mariage encore quelques points relatifs aux personnes entre lesquelles un mariage est interdit et aux mariages qui sont regardés come incestueux. A savoir ceux entre des gens liés par un certain degré d’affinité ou de consanguinité » (Adam Smith, 2009, p. 235)


D’abord, observe Adam Smith, le mariage entre ascendants est interdit par le droit civil et par le droit canon : un père ne peut épouser sa fille, tout comme la mère ne peut épouser son fils. Au passage, Adam Smith précise :

« Le mariage entre mère et fils est, de tous, celui qui est le plus contraire à la nature, le plus choquant et le plus abominable. Car l’affection qu’un fils doit ressentir envers une mère est très différente de celle qu’un mari devrait éprouver pour sa femme et de même, celle que doit ressentir une mère est très différente de celle d’une femme. Un fils est considéré comme étant totalement inférieur à sa mère et comme soumis à son commandement, notion totalement incompatible avec le rapport de mari à femme dans lequel le mari est supposé avoir la supériorité » (Id., p. 236).



Il précise ensuite que le mariage entre un père et sa fille est tout aussi choquant pour des raisons similaires mais peut, dit Adam Smith, se comprendre dans la mesure où le père à l’autorité morale sur sa fille. Dans tous les cas, ces types de mariages sont illégaux et intolérables.

Le mariage entre frère et soeurs

Ce type de mariage est également interdit dans la plupart des pays, même si dans l’histoire, les mariages entre frères et sœurs étaient courants : Smith prend l’exemple de la Rome ancienne où les fils vivaient dans de grandes familles et les cousins germains étaient assimilés à des frères. Il y a donc pu y avoir des mariage entre frères et soeurs qui étaient en réalité des mariages de cousins germains. Pour autant, le mariage entre cousins germains était interdit. En revanche, à Athènes, ce type de mariage était autorisé mais les époux devaient vivre dans des appartements séparés, notamment pour éviter les relations de jalousie au sein de la famille.

Les mariages entre oncles et nièces

Ils sont également interdits pour les mêmes raisons qu’entre père et fille ou entre fille et mère. L’affection entre oncle/tante et nièce/neveux peut être la même qu’entre parents et enfants.

Les mariages entre parents collatéraux éloignés

Ce type de mariage n’est pas interdit au-delà du quatrième degré, sauf dans le cas, précise Adam Smith, « des frères et sœurs d’ascendants immédiats, tels les oncles et les nièces, ou les grands oncles et des petites-nièces etc. » (p. 239).

L’interdiction vaut jusqu’au septième degré de parenté, soit jusqu’au septième cousin selon « notre droit ». Pour autant, cette mesure a été supprimée après la Réformes et dans le droit civil. En résumé :

« Les mariages sont interdits entre ceux qui ont le même degré d’affinité, de même qu’ils le sont entre ceux qui ont le même degré d’affinité, de même qu’ils le sont entre ceux de même degré de consanguinité, étant donné que les personnes considérées ont, dans les deux cas, en quelque sorte le même lien de parenté. La soeur de ma femme est comme ma soeur et il en va ainsi de suite pour les autres cas. (p. 239)


Autrement dit, s’il n’y a pas de lien d’affinité immédiat, le mariage est valide dans la conception qu’en propose Adam Smith. D’ailleurs, il insiste bien sur le fait que « les interdictions en vigueur dans notre pays (l’Ecosse du XVIIIe siècle) concernant la consanguinité sont emprunté à la loi de Moïse et concordent entièrement avec la nature et la raison (p. 240). Par contre, pour ce qui concerne les mariage de personnes liées par affinités relèvent davantage de l’organisation juridique qu’être interdit à proprement parler par les textes religieux.

Source :

Adam Smith, 2009, Leçons sur la jurisprudence, Paris, Dalloz

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